1.3 Une banlieue sans urbanité ?
Définition :
Lotir est d'abord une opération juridique qui relève, en l'absence de toute législation d'urbanisme, du droit privé. C'est une opération qui consiste à diviser une propriété foncière d'un seul tenant en petites parcelles destinées à être vendues à des personnes désireuses d'y implanter des constructions.
Le lotisseur - qui peut être n'importe qui, une veuve de maraîcher, une importante société foncière ou un notaire - découpe un terrain en parcelles toutes égales, le plus souvent sans aucun aménagement ni voirie. L'acquéreur accède à la propriété de 400 ou 500 m2 de terrain nu au terme de dix ou quinze ans de versements hebdomadaires ; l'achat se fait toujours à terme, le plus souvent par l'intermédiaire d'une société d'épargne ouvrière. Peu à peu, les parcelles se couvrent de maisons individuelles.
Les lotisseurs sont des personnes privées qui construisent à terme de l'espace public, leur logique est celle du propriétaire foncier qui entreprend de valoriser son bien en minimisant ses dépenses, mais l'aboutissement est la création de véritables quartiers de ville. La question centrale est celle de la voirie. Les rues, simples chemins de terre, sont des voies privées que les communes, débordées par l'afflux imprévu des nouveaux banlieusards, sont incapables d'intégrer dans la voirie communale. Simple quadrillage, le lotissement naît sans espace public, sans écoles, sans commerces. La ville naît ici du seul logement et de l'acharnement des lotis qui réclament l'accès à une urbanité minimale comme un droit à la dignité, dans une articulation originale entre aspirations privées et production d'espaces publics.
Sur la carte du Plan d'aménagement, d'extension et d'embellissement ( PAEE) dressée au début des années 1930, on distingue au Sud, l'ancien village de Goussainville, au centre , la voie ferrée construite sous le Second Empire pour desservir la sucrerie, et au Nord-Est l'immense lotissement de la ferme de la Grange des Noues, 4000 lots découpés sur 230 hectares à partir de 1923
Les communes où s'implantent les lotissements sont dépourvues de tous moyens ; ce sont des communes rurales ou maraîchères incapables de financer l'urbanisation brusque de ces nouveaux quartiers. La ville naît ici du seul logement et de l'acharnement des lotis qui réclament l'accès à une urbanité minimale comme un droit à la dignité, dans une articulation originale entre aspirations privées et production d'espaces publics.