Leçon 2 - Croissance de la banlieue et diversification des espaces 1860-1940

2.1 Une expansion en plusieurs phases

L'affirmation de la vocation industrielle de la banlieue ne suit pas une chronologie linéaire :

  • Des années 1840 aux années 1880, c'est une industrie au rabais, souvent délocalisée de la capitale, qui s'installe à Ivry, Saint Denis, Aubervilliers, sur des terrains moins coûteux qu'à Paris, mieux desservis par les voies d'eau puis, beaucoup plus tard, par les chemins de fer. Ces délocalisations s'accompagnent souvent d'une réorganisation du travail : en banlieue la main d'œuvre est moins chère, moins qualifiée, plus docile qu'à Paris. Pour l'ouvrier parisien, qui refuse d'y travailler, la fabrique située en banlieue, c'est « Cayenne », ou le bagne. Industries chimiques, mécaniques et métallurgiques, entreprises liées aux matériaux de construction, emprises ferroviaires s'installent ainsi au Nord, Nord Est, à l'Ouest (Puteaux, Suresnes, Courbevoie, Clichy, Boulogne) et au Sud Est (Charenton, Ivry, Vitry). Hyppolite Boulenger fonde en 1863 la faïencerie Boulenger à Choisy –le - Roi ; les transferts de la capitale se multiplient : Ivry et Vitry voient arriver les orgues Alexandre en 1859, la droguerie Poulenc à Ivry Port en 1862, à Ivry en 1898 puis à Vitry en 1911 ; les forges Lemoine en 1842, les forges Coutant en 1854 et en 1865 des ateliers de construction de matériel ferroviaire

  • La longue dépression industrielle qui frappe les économies occidentales dans les années 1880 entraîne de profondes mutations technologiques qui balayent les formes artisanales anciennes d'organisation du travail. En banlieue industrielle, entre 1873 et 1890, la crise touche les industries anciennes. A partir des années 1890, les branches de pointe choisissent de s'installer dans les communes de banlieue, là où les terrains sont les moins chers. L'automobile à l'Ouest, près de la clientèle des beaux quartiers, l'aéronautique, les constructions électriques, les industries de construction métallique, des industries alimentaires modifient le tissu industriel. Ces grandes entreprises appellent en banlieue les ouvriers parisiens qui viennent monnayer sur ce marché du travail élargi leur savoir faire. L'économie de guerre confirme cette vocation industrielle ; les effectifs gonflent partout : 22 000 employés chez Renault, 12 000 chez Delaunay - Belleville à Saint-Denis, 1800 aux forges Lemoine à Ivry. Avec la guerre, la banlieue est devenue la première région industrielle du pays, ce qu'elle restera jusqu'aux années 1960 ; entre 1895 et 1918, sur le quai du Petit Gennevilliers à Argenteuil s'installe l'usine de moteurs pour l'aviation Gnome et Rhône, devenue SNECMA en 1945 avec la nationalisation ; l'invasion industrielle colonise les plaines inondables gagnées sur la Seine à Ivry et Vitry, avec une fonderie, de l'électromécanique, une centrale thermique

  • Certaines communes refusent le passage à l'industrie et ses conséquences : Orly s'oppose en vain à l'installation d'une usine de linoléum en 1882, avec succès en 1906 à celle d'une usine d'engrais, puis en 1912 à celle d'une usine à gaz.

La grande usine moderne à la Belle Epoque : les compteurs de Montrouge, carte postaleInformationsInformations[1]
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