Leçon 4 - Banlieue rouge, l'apogée d'une culture ouvrière (1930-1980)

1.5 Les années noires : de la guerre au stalinisme

La signature du pacte germano-soviétique, l'interdiction du PC et de ses municipalités, les déchirements internes de l'appareil et des élus, n'altèrent pas la stabilité des équilibres électoraux. Aux premières élections d après guerre, les municipales d'avril 1945, le parti communiste, dirigeant seul ou en association avec la SFIO des listes d'Union patriotique de la Résistance, remporte 60 des 80 communes de la Seine, dont 50 élisent un maire communiste. A Argenteuil, une liste unique d ‘Union républicaine et anti fasciste, où le PC est majoritaire devant la SFIO et le MRP, recueille 90 % des suffrages. La guerre froide, la rupture avec la SFIO et l'arrivée du RPF en banlieue écornent sans la modifier l'implantation communiste, qui résiste même à l'assaut lancé par l'UNR aux élections municipales de 1959. Même si, aux législatives de novembre 1958, le PC, qui a perdu 30 % de ses voix au plan national, a connu d'éclatants échecs dans la ceinture rouge, comme la perte de son siège par Mathilde Gabriel Péri dans la circonscription d'Argenteuil-Bezons -Sannois face au candidat UNR .Ces reculs s'expliquent par la poussée gaulliste sur les enjeux nationaux, l'abstention, très rarement un retour vers la SFIO. De la Guerre froide à la V' République, la ceinture rouge se stabilise électoralement. Elle fournît troupes et cadres aux manifestations les plus dures de la Guerre froide.

Exemple

Le 28 mai 1952, quinze à vingt mille personnes, mobilisées par le Parti communiste français, descendent dans la rue à l'occasion de la venue à Paris du général américain Ridgway. Le 28 mai 1952, en pleine période d'activisme stalinien, le PC et la Fédération de la Seine organisent contre la venue à Paris du général Ridgway, commandant suprême en Corée, une manifestation très dure où les militants se rendent armés de manches de pioches, de boulons et de pancartes en fer. Deux mille manifestants de banlieue venus à pied d'Aubervilliers affrontent la police dans le nord de Paris. Au métro Stalingrad, débordée, la police tire , faisant un mort parmi les manifestants, Belaïd Hocine, un ouvrier algérien d'Aubervilliers.

Michel Pigenet , Au cœur de l'activisme communiste des années de guerre froide .La manifestation Ridgway, Paris, L'Harmattan, 1992.

Les élections du 2 janvier 1956 confirment la simplicité sociologique massive du vote communiste parisien. A Paris comme en banlieue existe une corrélation marquée entre vote communiste et pourcentage d'ouvriers dans la population active; de plus les ouvriers votent plus souvent communiste là où ils forment la plus grande partie de la population : à Neuilly, moins de la moitié des ouvriers votent communiste ; à Saint – Denis cette proportion s'élève au moins à 90 %. Pour l'ensemble de la ceinture rouge, les deux tiers des électeurs ouvriers ont voté communiste et les quatre cinquièmes des électeurs communistes appartiennent à la classe ouvrière. Ce vote de classe se fait pour un parti qui s'autoproclame parti de la classe ouvrière.

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