Leçon 5 - La solution des grands ensembles

Cours

Les critiques contre la politique urbaine se font jour après les évènements de mai 1968 ; critique marxiste d'un urbanisme jugé ségrégatif : « le capitalisme ne loge pas les travailleurs, il les stocke » comme l'écrit un slogan de 68 ; c'est la reprise politique d'un thème apparu dans la presse dès le milieu des années 60, celui de la « sarcellite », la maladie des grands ensembles, qui génèrerait ennui, suicide, délinquance, et toucherait particulièrement les femmes et les jeunes. Les responsables politiques s'interrogent aussi sur le type de société urbaine qui s'édifie dans les périphéries : comment donner une âme à ces nouveaux ensembles ? Comment recréer une communauté chez ses habitants venus de partout ? La construction d'équipements collectifs gérés par des animateurs et des professionnels du travail social ne satisfait personne. Les premières cités, construites dans l'urgence pour répondre à la demande pressante de logements, ont souvent été conçues comme provisoires et se dégradent très vite ; l'isolation phonique et thermique est inexistante ; mal entretenues, les constructions s'abîment avant même que tous les équipements soient terminés. A partir de 1965-1970, les investissements publics privilégient les villes nouvelles, surtout en banlieue parisienne.

La cité de l'espace au Blanc-Mesnil, années 1960 : la dégradation des alentours et l'absence d'espaces verts sont visiblesInformationsInformations[1]

Elu en 1974 Valéry Giscard d'Estaing prône le libéralisme avancé et réfléchit à un urbanisme à la française. La critique esthétique des barres et des tours et la critique sociale de la ségrégation conduisent à l'arrêt de la construction des grands ensembles par une circulaire du 21 mars 1973, qui consiste à interdire les opérations les plus massives et à tenter d'insérer les nouvelles constructions dans les villes anciennes.

L'Etat, à partir des années 1970, réoriente sa politique et ses crédits vers l'aide aux ménages qui veulent accéder à la propriété individuelle de leur pavillon : les banques rentrent sur le marché immobilier et la promotion publique s'effondre à partir de 1976. Des concours visant à abaisser le coût des logements individuels (Villagexpo en 1966 et Chalandonnettes en 1969) sont lancés sur l'initiative du ministère de l'Equipement et du Logement. L'ère des pavillonnaires prend le relais. Raymond Barre suggère dans un rapport présenté en 1975 une réforme du financement du logement. Destinée à faciliter l'accession à la propriété, promouvoir la qualité de l'habitat, améliorer l'habitat existant et adapter les dépenses de logement à la situation des ménages, cette réforme plaide pour une plus grande sélectivité de l'aide. Appliquée à partir de 1977, elle pose les bases d'une nouvelle politique du logement, refermant ainsi la page de l'après guerre. Elle privilégie l'aide sélective aux ménages, locataires ou accédants à la propriété, au détriment de l'aide à la pierre afin de rendre le marché plus fluide et de résoudre la crise naissante des grands ensembles, dont témoigne l'invention des procédures Habitat et Vie Sociale(1973-1977) qui financent les premières réhabilitations.

  1. Carte postale, collection particulière A.Fourcaut

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